Le juge de la sécurité sociale en Tunisie
Loi n° 2003-15 du 15 février 2003, portant création de l'institution du juge de la sécurité sociale.
Chapitre  Premier. - Dispositions générales 
                                                            Chapitre  II. - De la compétence du juge de la sécurité sociale 
                                                            Chapitre  III. - De la procédure devant le juge de la sécurité sociale 
                                                            Chapitre  IV. - Des voies de recours contre les jugements du juge de la sécurité sociale 
                                                            Chapitre V. - Dispositions transitoires
Chapitre Premier. - Dispositions générales
Article premier.
														    Il est créé près des tribunaux de première instance la  fonction de juge de la sécurité sociale. Il est compétent en matière de litiges  relatifs à l'application des régimes légaux de la sécurité sociale dans les  secteurs public et privé, à l'exception des litiges relatifs aux accidents de  travail et aux maladies professionnelles.
														    Art. 2.
														    La fonction de juge de la sécurité sociale près du tribunal  de première instance est exercée par un juge unique de premier grade ayant une ancienneté  de cinq ans au minimum.
														    En cas d'absence ou d'empêchement, le président du tribunal  le supplée par un juge du même tribunal.
														    La fonction de greffier à l'audience est exercée par un  greffier du tribunal de première 
Chapitre II. - De la compétence du juge de la sécurité sociale
Art. 3.
														    Le juge de la sécurité sociale connaît des litiges qui  opposent les organismes qui dispensent les prestations sociales et les pensions  prévues par les régimes légaux de la sécurité sociale dans les secteurs public  et privé et les bénéficiaires desdites prestations et pensions.
														    Il connaît également des litiges qui opposent les employeurs  ou les administrations dont relèvent les agents et les organismes qui  dispensent les prestations sociales et les pensions prévues par les régimes  légaux de sécurité sociale.
														    Il connaît aussi des litiges qui peuvent survenir entre les  bénéficiaires des prestations sociales et des pensions et leurs employeurs ou  les administrations dont ils relèvent, et ce, en ce qui concerne les déclarations  des salaires ou le versement de leurs cotisations au titre de la sécurité  sociale.
														    Art. 4.
														    Le juge de la sécurité sociale connaît des actions intentées  contre les organismes qui dispensent les prestations sociales et les pensions  prévues par les régimes légaux de sécurité sociale, relatives au remboursement  de ce qui a été indûment perçu au titre des cotisations. Il connaît également  des actions relatives à la constatation des dettes revenant auxdits organismes  au titre des sommes indûment versées et à leur restitution, à l'exception des  cas de saisie et des cas qui nécessitent la prise des états de liquidation.
														    Art. 5.
														    Le juge de la sécurité sociale connaît en premier ressort de  toutes les actions qui relèvent de sa compétence, quel que soit le montant  demandé.
														    Il connaît des demandes relatives à la remise des documents  nécessaires pour bénéficier des prestations sociales et pensions conformément  aux dispositions légales.
														    Art. 6.
														    Le juge de la sécurité sociale connaît de toutes les actions  incidentes, subsidiaires et reconventionnelles, qui rentrent par leur nature  dans sa compétence. Il statue sur ces actions en même temps que sur la demande  principale.
														    Art. 7.
														    Les litiges opposant les organismes qui dispensent les  prestations sociales et les pensions prévues par les régimes légaux de sécurité  sociale aux bénéficiaires desdites prestations et pensions sont portés devant  le juge de la sécurité sociale du lieu du domicile réel ou élu desdits  bénéficiaires.
														    Sont portés devant le juge de la sécurité sociale du lieu de  l'établissement principal ou secondaire du défendeur, les litiges qui opposent  l'employeur ou les administrations et les organismes qui dispensent les  prestations sociales et les pensions prévues par les régimes légaux de sécurité  sociale.
														    Sont portés devant le juge de la sécurité sociale dans le  ressort duquel le travail est exécuté ou dans le ressort duquel se situe le  domicile du bénéficiaire de la prestation ou de la pension, les litiges qui  opposent les bénéficiaires desdites prestations ou pensions et leurs employeurs  ou administrations.
														    Art. 8.
														    Le juge de la sécurité sociale du lieu d'exécution est  compétent pour statuer sur les difficultés relatives à l'exécution des  décisions rendues en matière de sécurité sociale.
Chapitre III. - De la procédure devant le juge de la sécurité sociale
Art. 9.
														    Le juge de la sécurité sociale est saisi par une déclaration  verbale présentée au greffier du tribunal, ou par requête écrite déposée  directement au greffe du tribunal ou envoyée par lettre recommandée ou par  document électronique fiable.
														    La requête doit indiquer notamment les nom, prénom,  profession, domicile, numéro de la carte d'identité nationale et le numéro  d'immatriculation du demandeur s'il est affilié à l'un des organismes qui  dispensent des prestations sociales et des pensions prévues par les régimes  légaux de sécurité sociale. Elle doit indiquer, le cas échéant, le nom de son  avocat ou mandataire, les nom, prénom et domicile du défendeur, et un résumé de  l'objet de la requête, les prétentions du demandeur et les moyens de preuve du  requérant. La requête doit être signée par le demandeur, son avocat ou son  mandataire, et accompagnée des moyens de preuve dont il dispose.
														    Si le demandeur ou le défendeur est une personne morale, la  requête doit mentionner sa dénomination, son siège social, sa forme juridique  s'il s'agit d'une société, ainsi que le numéro et le lieu de son  immatriculation au registre de commerce.
														    Le greffier du tribunal doit inscrire la requête le jour de  sa réception sur le registre tenu au greffe à cet effet, et la présente au juge  de la sécurité sociale en vue de fixer la date de l'audience de conciliation et  d'ordonner la citation des parties à cette audience.
														    Art. 10.
														    Le greffier du tribunal doit convoquer les parties auprès du  juge de la sécurité sociale par lettre recommandée avec accusé de réception. Le  juge de la sécurité sociale peut ordonner au demandeur, s'il le juge utile, de  faire citer le défendeur par huissier de justice.
														    La convocation doit indiquer les nom, prénom, profession,  domicile, numéro de la carte d'identité nationale et le numéro  d'immatriculation du demandeur s'il est affilié à l'un des organismes  dispensant des prestations sociales et des pensions prévues par les régimes  légaux de sécurité sociale. Elle doit indiquer aussi les nom, prénom et  domicile du défendeur, le numéro de l'affaire et la date de l'audience de  conciliation, avec indication de l'année, du mois, du jour et de l'heure.
														    Le délai de comparution à l'audience ne doit pas être  inférieur à quinze jours à compter de la date de l'envoi de l'assignation.  Toutefois, si l'affaire requiert célérité, le juge de la sécurité sociale peut  ordonner la convocation des parties par huissier de justice pour se présenter  dans un délai plus court que le délai susmentionné et même d'heure à heure.  Mention doit en être faite sur la convocation.
														    Art. 11.
														    Avant de statuer sur le fond, le juge de la sécurité sociale  doit procéder à une tentative de conciliation entre les parties en chambre de  conseil. Il est fait mention de cette tentative dans le jugement.
														    Lorsque le demandeur ou son mandataire ne comparaît pas à  l'audience de conciliation, après avoir été régulièrement convoqué, l'affaire  est rayée.
														    Lorsqu'il se présente à l'audience de conciliation, le  mandataire doit être muni d'un mandat spécial conformément à la législation en  vigueur.
														    Un procès-verbal de conciliation doit être dressé et signé  par le juge, le greffier et les parties.
														    Seules les parties contestées sont soumises au jugement,  quant aux parties de la demande reconnues exactes elles doivent être  mentionnées dans un procès-verbal signé par le juge, le greffier et les parties  concernées, et elles valent jugement exécutoire sur la minute.
														    Art. 12.
														    Les audiences du juge de la sécurité sociale sont publiques.  Les parties peuvent se présenter à l'audience personnellement ou se faire  assister par un avocat ou un mandataire conformément à la loi.
														    Lorsque le demandeur, ou son représentant ne comparait pas à  l'audience, le juge de la sécurité sociale poursuit l'examen de l'affaire au vu  des pièces du dossier.
														    Lorsque le défendeur, régulièrement cité, ne comparait pas à  l'audience, le juge de la sécurité sociale poursuit l'examen de l'affaire comme  s'il était présent.
														    Les personnes morales peuvent désigner des représentants  pour comparaître à l'audience conformément aux lois et règlements en vigueur.  Elles sont alors considérées comme comparaissant personnellement devant le juge  de la sécurité sociale.
														    Art. 13.
														    Lorsque les parties ne fournissent pas les moyens de preuve  nécessaires pour trancher le litige, le juge de la sécurité sociale peut  ordonner toutes mesures d'investigation qu'il estime nécessaires.
														    Art. 14.
														    Tout tiers ayant intérêt au procès a le droit d'intervenir  par une demande écrite qui doit être jointe au dossier et indiquant les causes  de son intervention.
														    Le tribunal peut d'office ou sur demande de l'une des  parties, ordonner l'intervention d'un tiers dans la procédure lorsqu'il estime  que sa présence est indispensable à l'appréciation du litige. Cette intervention  doit être effectuée conformément à l'article 10 de la présente loi.
														    Le tribunal doit ordonner l'intervention de toute personne  que la législation cri vigueur exige sa présence dans le procès.
														    Art. 15. 
														    Les bénéficiaires des prestations sociales et pensions  peuvent bénéficier de l'assistance judiciaire conformément aux textes en  vigueur et dans les cas prévus par les textes spéciaux.
														    Art. 16.
														    - Le juge de la  sécurité sociale statue sur le dossier conformément aux dispositions prévues  aux articles 45 à 48 du code de procédure civile et commerciale. Les  dispositions prévues pour la procédure devant le tribunal de première instance  sont applicables tant quelles ne s'opposent pas aux dispositions applicables au  juge de la sécurité 
Chapitre IV. - Des voies de recours contre les jugements du juge de la sécurité sociale
Art. 17. 
														    Les jugements rendus en premier ressort par le juge de la  sécurité sociale sont susceptibles d'appel devant le tribunal de première  instance.
														    Les jugements rendus par le juge de la sécurité sociale sont  exécutoires nonobstant appel, à l'exception de ce qui dépasse le quart des  montants dus à titre de capital décès, et les arriérés des pensions au delà  d'une année, ainsi que les montants qui n'ont pas un caractère alimentaire.
														    Art. 18.
														    Les parties peuvent, conformément aux dispositions du code  de procédure civile et commerciale demander le sursis à l'exécution des  jugements rendus par le juge de la sécurité sociale.
														    Les parties doivent être citées à l'audience en référé dans  les plus brefs délais et selon les modalités prévues à l'article 10 de la  présente loi.
														    Le greffe du tribunal doit adresser aux parties, dans les  quatre jours qui suivent le prononcé de jugement, par lettre recommandée  jouissant de la franchise postale, une copie de la décision de sursis à  l'exécution.
														    Art. 19.
														    L'appel est interjeté au moyen d'une requête écrite déposée  par l'appelant, son avocat, ou son mandataire, au greffe de la juridiction  d'appel.
														    La requête d'appel doit contenir les noms, prénoms et  domicile des parties et mentionner le numéro et la date du jugement attaqué  ainsi que les motifs de l'appel ; elle doit être accompagnée des pièces  produites par l'appelant.
														    Le greffier de la juridiction d'appel inscrit immédiatement  la requête sur le registre tenu à cet effet et en délivre récépissé. Il doit en  aviser immédiatement le greffe du tribunal qui a rendu le jugement et lui  demander l'envoi du dossier accompagné d'une copie administrative du jugement  attaqué, et ce, dans un délai ne dépassant pas quinze jours.
														    Art. 20.
														    Dès l'arrivée du  dossier, le greffier procède à son inscription sur un registre tenu à cet effet  et le transmet, dans un délai ne dépassant pas dix jours, au président du  tribunal qui désigne, le cas échéant, un juge rapporteur et décidera son  enrôlement à l'audience qu'il fixe.
														    Art. 21.
														    Le greffier de la juridiction d'appel doit convoquer les  parties selon la forme prévue à l'article dix de la présente loi, dans un délai  minimum de huit jours avant l'audience.
														    L'assignation adressée à l'intimé doit être accompagnée  d'une copie de la requête et des motifs de l'appel.
														    Art. 22.
														    Les parties peuvent comparaître personnellement ou se faire  assister ou représenter par un avocat ou un mandataire conformément à la loi.  Le président du tribunal peut également ordonner aux parties de comparaître  personnellement.
														    Art. 23. 
														    L'auteur du pourvoi est dispensé de consigner les montants  dus à titre de pourvoi, tels que prévus par le code de procédure civile et  commerciale. Les dispositions de l'article 15 de la présente loi sont  applicables aux jugements attaqués.
														    Art. 24.
														    Les dispositions du code de procédure civile et commerciale,  qui ne sont pas contraires aux dispositions de la présente loi, sont  applicables aux actions relatives aux régimes de sécurité sociale.
														    La juridiction d'appel et la cour de cassation statuent sur  les recours selon les règles qui leur sont applicables, dans la mesure où elles  ne dérogent pas aux dispositions de la présente loi.
Chapitre V. - Dispositions transitoires
Art. 25. 
														    Les affaires pendantes au moment de l'entrée en vigueur de  la présente loi restent soumises aux procédures applicables à cette date  jusqu'à ce qu'elles soient tranchées par le tribunal saisi.
														    Les jugements rendus dans les affaires visées à l'alinéa  premier de cet article ainsi que les jugements rendus avant l'entrée en vigueur  de la présente loi, restent soumis, en ce qui concerne les voies de recours et  la procédure, à la loi en vigueur avant cette date.
														    Art. 26.
														    Sont abrogées, toutes dispositions contraires à la présente  loi et notamment la loi n°58-48 du 11 avril 1958.
														    La présente loi sera publiée au Journal Officiel de la République Tunisienne  et exécutée comme loi de l'Etat.
														    Tunis, le 15 février 2003.
														    Zine El Abidine  Ben Ali